Très peu de manuels, tutoriels ou articles sur la photographie expliquent l’importance primordiale du point de vue sur la forme de l’image.

On en parle par rapport au sujet, au sens, à l’esthétique : comment se placer, trouver le bon angle, la bonne composition, mais peu par rapport à la géométrie, c’est-à-dire le rendu de la perspective, qu’on va systématiquement attribuer à l’optique.

On prétend ainsi que le tassement des plans lointains dans une photo est du à l’usage d’une longue focale, alors qu’il est du à l’éloignement du point de vue. Le tassement des plans lointains est identique avec n’importe quel autre objectif quel que soit son angle de champ, positionné depuis le même point de vue (mais qui évidemment ne procure pas le même cadrage).
De la même manière, ce n’est pas le grand-angle qui déforme un portrait serré, exagérant la taille du nez et diminuant les oreilles, c’est encore le point de vue, très près du sujet. Reculez sans changer de focale et les proportions du visage sont plus régulières (avec un cadrage plus large).

Avec le grand angle, un autre phénomène est à comprendre :

Dans le processus photographique courant, la lumière qui se reflète sur la scène en trois dimensions est projetée au travers de l’objectif sur une surface photosensible en deux dimensions et est sensible à l’angle d’incidence des rayons lumineux sur cette surface : plus on s’éloigne de l’axe de l’objectif et plus les rayons sont longs, provoquant un étirement radial de l’image.
Ainsi une sphère se projette dans l’axe de l’objectif en un disque régulier, et plus on s’éloigne du centre, plus la projection de la sphère est elliptique.

La déformation qui en découle est une sorte d’anamorphose, et comme toute anamorphose, il suffit de placer son regard au bon endroit pour voir l’image non déformée.
Dans le cas de la vue au grand angle, il faut placer son œil par rapport au tirage comme la surface photosensible était placée par rapport à l’objectif, en tenant compte du grandissement de l’objectif, de la taille du capteur et de la taille du tirage. La vision des bords déformés de l’image est alors contrebalancée par l’angle auquel notre œil observe, et nous les fait percevoir sans déformation.