Dès son avènement au 19e siècle, la photographie s’est développée comme une activité commerciale, ses inventeurs ayant tous des ambitions industrielles.
À cette époque très peu de gens possédaient une chambre photographique, la population faisait immortaliser les évènements marquants de sa vie, de la naissance au décès, dans les studios professionnels, mais pas que : de petits artisans œuvraient directement dans la rue.
Ces portraitistes économiques utilisaient des moyens techniques simples mais astucieux pour produire rapidement sur place.
Le client se faisait tirer le portrait et repartait son tirage en main !

Il y a peu d’informations sur cette activité en Europe et Amérique du Nord depuis ses débuts jusqu’à sa raréfaction à partir de la fin de la seconde guerre mondiale, mais elle perdure encore dans quelques rares régions très pauvres de la planète.
En Afghanistan on les nomme kamra-e-faoree, en Amérique Latine ce sont les minuteros.

À l’époque pionnière où il fallait quasiment tout faire soi-même, les artisans de rue se sont équipés d’un coffre en bois sur trépied combinant la fonction de chambre de prise de vue et de laboratoire de développement. Dans un souci de rapidité et d’économie, ils travaillaient avec du papier photographique négatif.

Depuis quelques années un nombre grandissant d’artistes et d’amateurs découvre et remet au goût du jour cette technique dans une démarche à la fois artistique, culturelle et pédagogique.

Rappelons le principe du négatif :
Le support (papier, verre, métal…) est enduit d’une émulsion sensible à la lumière qui, une fois exposée et développée, noircit selon la quantité de lumière reçue : plus un détail de la scène photographiée est sombre, moins il reflète de lumière, moins il fera noircir l’émulsion, et inversement plus un détail est clair, plus il reflète de lumière et plus il noircira l’émulsion.
On obtient ainsi un cliché où les valeurs de densité sont inversées par rapport à la réalité.

En découle le procédé du portraitiste de rue suivant :
• prise de vue du sujet sur une première feuille de papier sensible,
• développement de cette feuille donnant une image en négatif,
• photographie de ce négatif sur une autre feuille de papier sensible,
• développement de cette seconde feuille donnant un négatif du négatif, c’est-à-dire une image positive.

Pour la prise de vue, la chambre comporte un objectif fixe et un système de mise au point interne.
Ce système de mise au point est constitué de deux rails dans la longueur près du plafond de la chambre auxquels est suspendue une planche coulissante qui supporte le papier et le verre dépoli servant à cadrer et mettre au point. Cette planche est actionnée de l’extérieur par une tirette à l’arrière de la chambre et une trappe à l’arrière permet d’observer la focalisation sur le dépoli.

Les objectifs anciens étant généralement dépourvus d’obturateur, on enlevait puis replaçait le bouchon de l’objectif ou un chapeau noir pour exposer le négatif. La faible sensibilité des émulsions exigeait des temps d’exposition de plusieurs secondes, l’imprécision de l’obturation à la main avait alors peu d’importance.
Par contre cela contraignait le sujet à une immobilité parfaite durant toute la durée de la pose, ce qui explique les airs pincés et la raideur des gens sur les photos d’époque !

La partie labo se compose d’une boite réserve de papier, de deux cuvettes avec le bain révélateur et le bain fixateur. Un œilleton fermable dans le couvercle de la chambre au-dessus de la cuvette de révélateur permet d’observer et contrôler le développement du cliché éclairé latéralement par une fenêtre avec un filtre rouge inactinique, c’est-à-dire laissant passer une lumière qui ne voile pas le papier (l’émulsion n’est sensible qu’au bleu et éventuellement au vert).

La reproduction du négatif se fait à l’aide d’un bras-support escamotable à l’avant de la chambre, permettant de placer le négatif devant l’objectif. La reproduction se fait donc à l’échelle 1:1, les distances négatif-objectif à l’extérieur et objectif-positif à l’intérieur étant chacune égale au double de la longueur focale de l’objectif.

Une fois un cliché révélé et fixé, il suffit de le sortir de la boite et de le rincer par trempage dans un seau d’eau ou n’importe quelle source d’eau courante.

Voici pour l’introduction, elle sera suivie d’un article présentant la chambre-labo que je me suis construite et les solutions que j’ai choisies…